Mésopotamie : art et archéologie

Relief votif perforé de Doudou
Relief votif perforé de Doudou

L'importance des Mésopotamiens est incontestable dans de nombreux domaines de la pensée, mais il n'est nullement certain que, dans les arts, il en ait été de même.

1. Les aspects spécifiques de l'archéologie mésopotamienne

1.1. Les tells

C'est l'archéologie, et elle seule, qui a révélé la civilisation de l'antique Mésopotamie ; il convient donc de marquer très exactement ce que l'on peut attendre de cette discipline dans la connaissance de ce pays. Un trait caractéristique du paysage est donné par la présence, partout où l'occupation de l'homme a été longue et dense, d'éminences dont l'altitude dépasse souvent 25 m et atteint parfois, mais plus rarement, 40 ou 50 m : ce sont les tells, le mot tell étant un terme arabe qui signifie simplement « colline » et que les archéologues ont spécialisé en l'attribuant aux monticules artificiellement créés par une longue présence humaine ; leur formation est la simple conséquence de l'élévation d'habitats nouveaux sur les débris d'habitats antérieurs. Ce phénomène est absolument normal et se retrouve chaque fois qu'une installation de populations sédentaires a duré assez longtemps pour qu'une accumulation de débris de l'activité de l'Homo faber soit sensible ; mais la spécificité de l'Orient en ce domaine vient essentiellement de la rapidité du processus d'accumulation. Cette croissance, souvent plus rapide qu'ailleurs, est liée à trois facteurs d'importance inégale : c'est tout d'abord l'emploi de l'argile sous forme de briques crues comme matériau de construction ; ce matériau n'est pas aussi mauvais qu'il pourrait paraître si un minimum d'entretien est assuré, mais, abandonné à lui-même, sous l'effet des pluies, souvent violentes en hiver, ou des vents, parfois chargés de sable, le mur s'effrite à la base et en bordure de la toiture-terrasse, en sorte qu'il est rapidement détruit. On considère, en général, que la vie moyenne d'une maison, mais non d'un temple ou d'un palais, ne dépasse guère une génération ; en réalité, elle peut être plus longue à condition d'être l'objet d'un entretien régulier. Ce sont ensuite les conditions de vie extrêmement précaires en raison des guerres de conquête, des razzias, des destructions volontaires de villes entières lors d'un assaut, mais aussi parce que les foyers domestiques sont installés, au mépris de tout souci de sécurité, à l'intérieur même des pièces, provoquant ainsi des incendies accidentels. Ce sont enfin certaines habitudes ou certains comportements collectifs qui peuvent avoir à l'occasion une incidence sur l'élévation des tells : en cas de destruction de l'édifice, pour quelque raison que ce soit, les parties effondrées ensevelissent les bases des murs et les protègent sur une hauteur qui peut atteindre facilement 1 m ; si le site est alors abandonné, l'érosion achève son œuvre, et il ne reste plus, au terme du processus, qu'une petite colline ; mais si la maison est reconstruite, on n'élimine pas les parties effondrées, qui ne sont rien d'autre que de l'argile ; hormis le bois, toujours très cher, et parfois la pierre, utilisée dans des emplois très particuliers (seuils par exemple), on ne récupère pas les matériaux et l'on se contente dans la plupart des cas d'une égalisation du sol et d'une reconstruction ; celle-ci prend souvent appui sur les murs anciens, qui, donc, continueront de jouer un rôle, mais comme fondation cette fois. Ainsi, la première habitation est comme fossilisée avec tout le matériel qu'elle peut contenir et protégée par la nouvelle construction. Quelques années ou quelques dizaines d'années plus tard, le même processus recommence, et le sol se trouve une nouvelle fois surélevé. Au terme d'une longue existence, la superficie au sommet du tell devient si exiguë que celui-ci est abandonné soit partiellement, soit totalement ; mais c'est bien plus souvent pour des raisons de guerres, d'épidémies, de transformations des conditions économiques qu'un tell est déserté ; certains sites de l'Antiquité sont toujours occupés (Erbil par exemple), ce qui n'en facilite pas l'exploration.

Les principes qui régissent l'étude des tells ne sont guère différents de ceux qui sont en usage pour un quelconque site archéologique. En Mésopotamie comme ailleurs, l'archéologie n'a trouvé que lentement ses méthodes ; à la simple pratique des trous, des tunnels et des tranchées utilisée au xixe s. avant J.-C. pour la chasse à la statue, au bas-relief ou au lot important de tablettes a succédé la prise de conscience d'une nouvelle notion, à savoir que la fouille est l'exploration des sources mêmes de la connaissance archéologique, et donc historique, puisqu'en Mésopotamie seul le dégagement des cités antiques permet de trouver des textes ; de ce fait, l'archéologie est doublement source d'histoire. On a progressivement compris que l'on ne pouvait dissocier les objets de leur contexte archéologique d'ensemble ou particulier et que la fouille devait rendre compte d'un ensemble existant à un moment précis, significatif du groupe humain qu'il représente. Pour atteindre ce but, il faut savoir allier au cours de l'exploration rigueur et souplesse, repousser la tentation de la voie facile et, tout en procédant avec les principes méthodologiques des théoriciens modernes, ne pas oublier qu'il convient de s'adapter aux circonstances en raison même du caractère unique et irréversible de chaque opération de fouille. Il est nécessaire de signaler que l'on ne peut fouiller de la même façon un village néolithique ou un site assyrien qui contient des temples ou des palais de grande ampleur. Ce qui différencie surtout les tells d'Orient de la plupart des sites méditerranéens, c'est que les murs ne se distinguent que très difficilement des décombres qui constituent le reste de la colline ; seule une grande pratique permet, grâce à une couleur très légèrement différente du sol ou à l'existence de lignes blanches très ténues, ou encore en raison d'une consistance plus ferme sous le couteau, de déceler les murs in situ et de les isoler des parties effondrées ou lessivées par la pluie ; un néophyte ne voit jamais rien et s'étonne souvent de la faculté de certains de faire sortir des murs là où eux-mêmes ne perçoivent que des tas de boue. Enfin, et contrairement à ce que l'on pense, l'opération archéologique ne rend qu'une infime partie des objets utilisés par les populations que l'on étudie. La nature des objets retrouvés dépend pour une bonne part des conditions de conservation dans le sol. Or, à l'inverse de celles, exceptionnellement favorables, qui règnent en Égypte, l'humidité du sol, toujours assez importante en Mésopotamie en dehors même des périodes d'inondation, entraîne une rapide désagrégation des matières organiques enfouies. On ne peut pratiquement pas compter, du fait de la rareté des pierres, sur des îlots de sécheresse qui auraient favorisé la conservation des objets périssables comme dans les tombeaux égyptiens ; il est donc très rare de trouver des objets en bois, des fragments de tissu, des restes de cuir, dont on connaît l'importance par les tablettes. Ainsi, le plus grand nombre des objets de la vie quotidienne de l'antique Mésopotamie échappe à notre connaissance.

1.2. La civilisation de l’argile

Outre les édifices architecturaux, la fouille fournit cependant tout un matériel qui permet de définir les caractéristiques majeures de cette civilisation. Celle-ci apparaît d'abord comme une civilisation de l'argile, qui est la seule matière première abondante du pays. C'est l'argile, devenue le support principal de l'écriture, qui a permis de conserver sous la terre des tells, pendant plusieurs millénaires, des textes tant littéraires que sapientiaux, des lettres où les souverains donnaient des instructions à leurs subordonnés, où ils correspondaient entre eux pour nouer et dénouer des alliances, des textes de la vie courante, mais combien riches d'enseignements, où l'on fixait les conditions d'un échange avec son mode de règlement, où les principes d'une succession étaient stipulés. Cette catégorie, considérée comme particulièrement noble, du matériel dégagé ne doit pas faire oublier le nombre très important de céramiques entières ou fragmentaires, qui non seulement favorisent l'étude des ustensiles de la vie quotidienne, mais surtout permettent d'établir des séries qui portent la marque des transformations et servent ainsi à l'étude des différentes phases de la civilisation mésopotamienne. Ses qualités plastiques ont fait jouer en outre à l'argile un rôle dans l'élaboration des formes artistiques non seulement pour l'architecture elle-même, mais aussi pour le décor architectural ainsi que pour les moulages, les figurines modelées, qui ont servi d'offrandes pour les divinités et où sont représentés un grand nombre de dieux et des scènes de la vie quotidienne.

1.3. Les diverses avancées techniques

La Mésopotamie est aussi l'héritière des civilisations de l'âge de la pierre, comme en témoigne une bonne part du matériel, mais l'importation de ce matériau indispensable conduisit à restreindre son usage soit aux objets de première nécessité, soit à des créations artistiques chargées de pérenniser une pensée ou une action ; à l'époque de l'outillage lithique, lorsque rien ne pouvait remplacer cette matière première, il n'a certainement pas été question d'en restreindre l'usage ; les fouilles (tell es-Sawwan [ou al-Suwan]) montrent déjà la maîtrise des hommes en ce qui concerne aussi bien la fabrication des armes ou des outils que celle des récipients ou des amulettes. Par la suite, malgré l'introduction de l'outillage de bronze, puis de fer, la maîtrise des Mésopotamiens en ce domaine continua à se manifester, comme en témoignent les statues, les plaques gravées et les bas-reliefs, que les fouilles ont remis au jour, ainsi que les amulettes et les cylindres, sans lesquels il n'est pas possible de comprendre certains aspects de cette civilisation. Enfin, à partir du IIIe millénaire avant notre ère, la plaine mésopotamienne, en dépit de l'absence totale de tout minerai, s'affirme comme une civilisation de l'âge du métal ; les pratiques commerciales compensent l'absence de minerais. Dans les villes, des artisans opèrent des alliages, fabriquent armes et outils, qui sont ensuite utilisés sur place ou revendus, fournissant ainsi à la cité et à l'autorité, palais ou temple, de fructueux bénéfices et une puissance réelle. Le métal est aussi devenu un moyen d'expression artistique par la fabrication de vaisselles diverses richement décorées, de statuettes ou même de statues composites, où il sert de revêtement extérieur, par le placage des portes et enfin par tous les bijoux, d'or et d'argent en particulier, où la dextérité des artisans mésopotamiens a su s'affirmer.

La civilisation mésopotamienne, telle qu'elle apparaît à partir des fouilles, ne se réduit pas à ces fondements strictement matériels, et la production écrite permet de déceler d'autres composantes. Si, en outre, on se rappelle que certains aspects ont disparu à cause de la dégradation dans le sol, on comprend que l'archéologie ne puisse rendre compte que d'une partie du monde mésopotamien antique ; mais l'activité archéologique reste néanmoins essentielle, puisqu'elle seule permet de remettre au jour les textes et les documents qui constituent la base des études historiques actuelles.

2. Les traits caractéristiques de l'art

2.1. Un art mal connu

L'importance des Mésopotamiens est incontestable dans de nombreux domaines de la pensée, mais il n'est nullement certain que, dans les arts, il en ait été de même. Des rapports ont certainement existé entre les différentes contrées de l'Orient et, si des emprunts sont décelables, il n'en reste pas moins que l'évolution de l'art est fondamentalement dominée par des motivations internes et non par des impulsions extérieures ; d'autre part, si l'on veut bien songer à la longue durée de cette civilisation, on est frappé par une certaine indigence créatrice des Mésopotamiens. Certes, il est des réussites qui témoignent parfois du contraire ; pourtant, comparées à la masse des objets retrouvés dans les fouilles, elles font figure d'exceptions et ne peuvent sans doute prétendre représenter la spécificité mésopotamienne en matière artistique. Peut-être une cause essentielle est-elle fournie par les conditions mêmes de la création ; l'art mésopotamien est, pour la plus grande partie, d'essence religieuse ; en tant que tel, il n'est pas destiné à exprimer les aspirations esthétiques des individus, mais bien plutôt à établir un lien, qui se veut souvent contraignant, entre l'homme et la divinité. Une telle conception conduit dans de nombreux domaines les interprètes du monde religieux à diriger les artistes, soit parce que la divinité est censée avoir donné elle-même les règles de la création, soit parce qu'il ne convient pas de porter atteinte à une forme qui a réussi sur le plan magique ou qui est conforme à la tradition. Toujours est-il que bien souvent l'artiste n'a qu'une très faible liberté de manœuvre et qu'il doit se conformer au canon donné par les prêtres. Dans ces conditions, ce n'est pas à l'absence d'esprit créateur, thèse démentie d'ailleurs par certaines œuvres, qu'il faut imputer une certaine indigence artistique, mais bien plutôt aux tendances profondes d'une civilisation qui chercha à se prémunir dans un milieu difficile et souvent hostile contre les aléas du devenir par une fixation des traditions. Il ne faudrait pas, toutefois, exagérer cette pauvreté artistique ; tout d'abord, l'exploration archéologique est loin d'être achevée et, si l'on n'en peut attendre de véritables bouleversements, elle peut apporter encore bien des surprises ; un bilan n'est donc possible que si l'on admet son caractère provisoire ; d'autre part, comme on l'a dit, les conditions de conservations dans les tells mésopotamiens n'ont pas permis à toutes les manifestations artistiques de parvenir jusqu'à nous ; ainsi, à diverses reprises, la preuve a été faite que la grande peinture murale a joué un grand rôle en Mésopotamie (l'autel du tell Uqair, les grandes compositions du palais de Zimri-Lim de Mari, celles du palais d'Aqarquf [site de la Dour-Kourigalzou kassite] ou de certains palais assyriens), mais les rares vestiges qui en ont survécu ne permettent certainement pas de rendre compte de toutes les réalisations antiques dans ce domaine. En outre, il faut envisager l'art d'une façon globale et non par quelques-unes seulement de ses manifestations. Enfin, parler d'un art mésopotamien pendant plusieurs millénaires peut prêter à confusion ; tout au long de l'histoire du pays de Deux Fleuves, il n'y a pas eu un, mais plusieurs centres créateurs. L'histoire des écoles propres à chaque centre n'a pas encore été tentée ; il se pourrait pourtant qu'une telle étude mît en évidence, outre les diversités, les principales règles de la création et le processus qui conduisit à l'élaboration de certains canons.

Sans entrer dans le détail, on peut indiquer ici que l'époque sumérienne ancienne (fin du IVe millénaire avant notre ère et première moitié du IIIe millénaire avant notre ère) est remarquable par la variété des centres créateurs et par leur apparente indépendance : Ourouk, Our, Lagash, Fara, Mari ainsi que les principaux centres de la vallée de la Diyala ne sont pas tous contemporains et ils offrent des traits spécifiques qu'il est bien difficile d'attribuer à l'ensemble mésopotamien. Par la suite, la formation des grands Empires akkadien, néo-sumérien et babylonien s'accompagne d'une uniformisation de la production artistique liée à une conception précise du pouvoir qu'il convenait de faire accepter par l'ensemble du pays, alors que les tendances au particularisme risquaient de reprendre le dessus ; mais chacune de ces périodes présente des caractéristiques propres qui ne peuvent se fondre facilement dans une seule définition. Si les circonstances précises de la création artistique ne sont pas encore très claires pour la seconde moitié du IIe millénaire avant notre ère, au Ier millénaire avant notre ère, en revanche, il apparaît qu'il n'y a pas identité entre les productions des centres assyrien et babylonien. Il convient donc de manier avec la plus grande prudence le concept d'un art mésopotamien spécifique ; derrière quelques règles d'ensemble, c'est plus la diversité qui frappe qu'une uniformité, en définitive plus apparente que réelle.

2.2. L’architecture

Si l'on étudie le domaine de l'architecture, moins révélateur, cependant, que certains autres, car les contraintes nées d'un milieu peu favorable sont déterminantes pour les formes mêmes des constructions – et ces contraintes sont très voisines du nord au sud de la Mésopotamie –, il apparaît que, derrière une uniformité de façade, les caractères spécifiques de l'art de bâtir n'ont pas été les mêmes au cours des trois ou quatre millénaires de l'histoire de la Mésopotamie. Certes, la nature de la brique crue et la rareté du bois furent deux facteurs déterminants qui ont contribué à donner naissance à une architecture parallélépipédique aux formes massives, mais non sans majesté, dans laquelle les salles sont longues et étroites, où la nécessité de trouver la lumière à partir de la porte pour éviter d'avoir à affaiblir les murs en ouvrant des fenêtres conduit à la systématisation du plan mésopotamien courant, où sur une cour intérieure donne une série de pièces assez semblables le plus souvent les unes aux autres. Mais comment expliquer, sinon par des traditions locales différentes, l'existence de deux systèmes d'organisation de la cella par rapport à la cour, l'un à partir d'un accès coudé qui l'isole du reste du bâtiment, mode que l'on trouve par exemple en Assyrie ou dans la Diyala, l'autre, au contraire, dans un système axé depuis l'entrée qui incorpore la cella à l'ensemble du bâtiment, tel qu'on le trouve à Ourouk à l'époque sumérienne archaïque, à Our lors de l'Empire néo-sumérien ou dans l'Empire babylonien ? Des faits de même nature peuvent être décelés dans les simples maisons d'habitation ou dans les résidences palatiales. Le décor des parois rend compte de particularismes voisins : ainsi, les mosaïques de cônes, faites avec des pierres de couleur différente ou en terre cuite peinte, qui ornaient certains murs des temples d'Ourouk n'auront pas de successeur direct, mais le goût des parois ornées demeura soit par des redents qui donnaient naissance à un jeu mouvant d'ombre et de lumière tout au long de la journée, soit par de grandes peintures murales que l'on retrouve dans la Mésopotamie centrale et septentrionale à Mari, et à Til Barsip, ou encore par des orthostates de pierres sculptées, mode décoratif propre à l'Assyrie, ou enfin par un revêtement de briques, à relief émaillé ou non, que l'on trouve en Babylonie au Ier millénaire avant notre ère.

2.3. Les innovations

Hormis les rares vestiges de peinture déjà mentionnés, les domaines artistiques concernent la céramique décorée (de peu d'importance en Mésopotamie après le Néolithique), la sculpture (ronde-bosse ou bas-relief), les terres cuites moulées ou les figurines modelées et toutes les surfaces gravées ou ciselées, qu'il s'agisse de pierre, de métal, d'os ou d'ivoire. Si l'on examine de près ces diverses manifestations artistiques, c'est une certaine richesse d'invention aux époques archaïques qui frappe, et plus spécialement dans la glyptique. En effet, pour des raisons économiques, les Mésopotamiens ont fait grand usage du cylindre-sceau et ont manifesté un goût très vif pour cet objet, qui, pour une part, s'identifiait avec la personne elle-même. On se trouve en présence ici d'une production riche et variée pour certaines époques ; c'est au IIIe millénaire avant notre ère qu'éclate la diversité des écoles, tandis qu'avec l'Empire akkadien les tendances à l'uniformisation sont nettes, et elles se marquent plus nettement encore au début du IIe millénaire avant notre ère ; par la suite, des traits propres aux Kassites ou aux Assyriens peuvent être définis. La ronde-bosse est peut-être moins significative à cet égard, car aux étonnantes réalisations de l'époque sumérienne archaïque ou classique – où l'on ne saurait confondre la Dame de Warka (site d'Ourouk, aujourd'hui au musée de Bagdad), réussite tout à fait exceptionnelle, avec les statuettes de la Diyala, celle du dieu Abou en particulier, ou avec celles qui sont sorties des ateliers de la cité de Mari – succèdent encore de très belles œuvres, les statuettes de Goudéa retrouvées à Tello ou quelques statues des royaumes amorrites ; mais la production se raréfie beaucoup alors, et il est difficile de s'extasier sur les rares témoignages de l'époque assyrienne, qui fut cependant particulièrement active dans la fabrication des bas-reliefs.

En dépit des réserves que peuvent susciter certaines œuvres des artistes et artisans mésopotamiens, il faut sans doute admettre que, placés dans un contexte plus souple, ceux-ci auraient eu, selon toute vraisemblance, une production très différente ; on n'en veut pour indice que la maîtrise manifestée tout au long de l'histoire mésopotamienne dans l'art animalier : l'aisance dans les mouvements et dans l'action, la grâce de certaines attitudes, la puissance dans l'effort ou dans l'attaque sont des traits caractéristiques de cet art mésopotamien, depuis la glyptique d'Ourouk jusqu'aux bas-reliefs assyriens. On peut supposer que le prêtre n'était pas alors derrière l'artiste pour lui dicter son œuvre et l'empêcher de s'égarer dans une liberté peu conforme aux exigences de la religion.